ça va trop être mon image des coups de gueule ça |
« Tu vas acheter de
vrais livres pour une fois ? »
Cette phrase, nombreux
amateurs de bandes dessinées franco-belge, comics et manga l'ont entendu au
moins une fois dans leur vie. Prononcée par un parent intentionné mais
néanmoins un peu inculte, qui n'a jamais su se sortir de la tête ce que ses
professeurs de français lui déclamaient sans cesse
(« BalzacHugoZolaFlaubert aaah les classiques ! »), combien ont
eu envie suite à ça de hurler que si, le manga EST un vrai livre ?
Quelles sont les arguments
desservis à l'encontre du manga, encore aujourd'hui ? Amusons-nous à les
énumérer et à les démonter sauvagement à coup de belles phrases qui auraient
fait rougir Emile Zola ou autre écrivain naturaliste.
1. "Le manga, c'est violent"
Cette image vient, comme
tout le monde le sait, de la diffusion polémique de la série Ken le survivant dans une émission pour
enfants, alors qu'il s'agit sans nul doute d'un seinen. Mais doit-on condamner
un genre pour une maladresse commise par des incompétents qui font diffuser un
dessin animé sans même le regarder ? Les gens qui continuent à nous
abrutir avec cette affirmation n'ont jamais lu un Princesse Kilala, un Card
captor Sakura ou encore un Doraemon.
2. "Le manga, c'est vulgaire"
A comprendre « OHMYGAUD
DES SEINS DES FESSES DES GENS DENUDES !! ». Oui alors encore une
fois, cela touche certaines catégories de manga, et pas le manga en général. On
considérait Zola pervers de son temps, après tout.
Alors oui, il existe des
manga politiquement incorrects, et des auteurs qui dépassent les limites (Je
pense facilement à beaucoup d'auteurs de yaoi et Mayu Shinjo), qui font des
histoires dénuées de toute morale. Et quand moi je dis ça, comprendre que le
viol y est sublimé et que des générations d'ados s'imaginent qu'un ténébreux
yakuza, c'est trop cool et c'est trop le bon parti, surtout s'il vous force à
coucher avec lui. Mais il existe de l'autre côté des manga bien déjantées comme
Beelzebub et One Piece, des manga qui amènent une véritable réflexion comme Death note et Détenu 042, des manga avec de jolies histoires d'amour comme Sawako et Fruits basket. Bref, y en a pour tous les goûts !
3. "Le manga, c'est pour les enfants"
Bah il faudrait savoir les
gens. C'est violent, vulgaire et pour les enfants ? La contradiction
soulevée par cette affirmation montre bien l'ignorance de ceux qui la prononce.
C'est comme affirmer que la littérature n'est que pour les adultes ! Nous
avons la chance d'avoir un genre de bande dessinée découpé en différentes
catégories, qui couvrent un lectorat qui va de la petite enfance aux adultes,
profitons-en nom de nom !
Et puis rien que pour faire
mentir les gens qui me balanceraient Chi une vie de chat à la figure (manga que
j'adore, je tiens à le signaler), si nos éditeurs français en ont fait un manga
pour enfants, il est catégorisé en seinen chez nos amis nippon (pourquoi, ça...)
4. De toute façon tous les manga se ressemblent/tous les
personnages de ton manga se ressemblent.
Réunissons
ces deux critiques et analysons-les ensemble, de façon calme et posée.
UN :
Il est IMPOSSIBLE d’avoir un style complètement dénué de toute ressemblance
avec le style d’un autre dessinateur. A moins de se lancer dans l’expérimentation
la plus totale, et encore ! On vous accuserait de copier sur Picasso.
DEUX :
le travail de mangaka, c’est pas de la tarte. C’est très peu d’heures de
sommeil et beaucoup de temps passés à dessiner en atelier avec des assistants,
et une pression constante à cause des éditeurs et des deadlines. Chaque mangaka
a donc son truc pour dessiner rapidement et oui, certains malheureusement font
des personnages identiques (Je pense notamment à Gals… Et puis un petit peu à Naruto.
Faut arrêter, tout le monde savait que l’Hokage qu’est mort, c’était son père).
Et à côté, on a One Piece, Fairy Tail, Sawako et bien d’autres, où les auteurs se cassent la tête pour
faire des personnages bien dissociés les uns des autres. Les seuls imbéciles
qui viendront m’asséner que tous les persos de One Piece se ressemblent n’ont tout simplement jamais ouvert un tome.
5. De toute façon, ça n'apporte rien, un manga
Faux.
Comme beaucoup d’histoires, films, romans, pièces de théâtre, je vous rappelle
que nombreux manga se basent sur des scénarios et portent un message de la part
de l’auteur. Une œuvre ne saurait être créée sans volonté de partage et sans
réflexion (Même derrière Twilight y a du avoir un minimum de réflexion, même si le rendu final me fera toujours hurler de rire. On n'a jamais dit que tout ce qui paraissait était bon aussi). Encore une fois, je vous défie de lire Death note sans être interpellé par l’antagonisme « avoir le
pouvoir »/« avoir le droit de s’en servir comme bon nous semble ».
Et One piece ne présente-t-il pas des
personnages prêts à tout pour leurs amis, et surtout prêts à se rebeller contre
une justice qui n’en est pas une ? Peut-on rester de marbre face à la
volonté de Tohru de se battre envers et contre tous pour sauver les gens qu’elle
aime, allant jusqu’à affronter la volonté d’un supposé dieu ?
Il faut
garder en tête également que la psychologie des personnages est énormément
travaillée. On n’est pas devant une bande dessinée franco belge qui va s’attarder
sur les décors, ni sur un roman français qui explore les relations entre les
personnages. Cela donne une profondeur au manga que l’on ne retrouve pas
forcément dans les autres genres littéraires, et qui en fait en quelque sorte
sa spécificité.
Encore
une fois, nous avons la chance d’avoir à notre disposition un genre aussi riche
que varié, pourquoi chercher à le discréditer ? Comme la bande dessinée,
comme tout type de littérature, chacun peut y trouver son bonheur. Après, il
existe des gens qui essayeront d’en lire et n’adhèreront pas au dessin en noir
et blanc, au découpage, à la dynamique. Peu importe, tous les goûts sont dans
la nature. Cela ne veut pas dire que le manga est un mauvais genre (déclaration
qui en soit ne veut rien dire, notez).
Dans une
prochaine partie, nous hurlerons sur les copieurs et les professeurs de bande
dessinée dont l’insulte favorite est « T’as un style manga ».
Juste énorme et tellement vrai, on a tous et toutes pris ces inepties dans la tronche au moins une fois, que ce soit par des parents, des crétins ou des profs, et ça fait du bien de lire ça :)
RépondreSupprimerJ'aime tes coups de gueule xD
RépondreSupprimerJ'étais déjà à fond derrière toi pour les yaoi, mais avec cet article, je t'applaudis carrément avec les deux mains et les deux pieds....
Les gens prennent maintenant un malin plaisir à casser ceux qui ne pensent pas comme eux. Beaucoup ne se sentent vivre qu'en écrasant les autres. C'est pitoyable...
Comme tu l'as souligné, on colle au manga des étiquettes complètement inappropriées tout simplement parce que ses détracteurs critiquent ce qu'ils n'ont même pas pris la peine d'essayer. Qu'ils présentent de vrais arguments et un minimum de politesse et de respect, et on verra s'il y a vraiment besoin de ce genre de débat ^^
Hier encore j'avais une dame (50 ans ~) qui disait à propos d'une autre "mais elle lit que des bandes dessinées ?!". C'est choquant d'entendre ça aujourd'hui !
RépondreSupprimerA la bibli par contre j'ai noté qu'ils différencient bien les manga enfants et adultes, une première étape de franchie ! \o/
Ca commence ! \o/ Et j'arrête pas d'entendre "tu vas acheter de vrais livres ?", pas plus tard que ce matin un père qui vantait Balzac, Musset, Hugo, alors que sa gamine avait juste envie de lire pour se faire plaisir
SupprimerC'est tellement vrai ... et tellement dépitant !
RépondreSupprimerLes gens qui parlent sans savoir sont de plus en plus nombreux ... Mais nous au moins on sait de quoi on parle, et on sait qu'on aime :P
En réalité, c'était encore pire avant. Aujourd'hui, les parents acceptent de plus en plus d'offrir des manga aux anniversaires ou à Noël. Quand j'ai commencé à en lire, je devais les cacher parce que ma mère avait décrété en gros que c'était du porno. On était déjà en 2003, et c'était Dragon ball et Yugiho, la blague ultime ! Mais il y a toujours des gens qui sont contre, et qui nous balancent des âneries aussi énormes que "les pokemon ont été créés par Satan !". Heureusement oui que nous savons en parler, et savons surtout nous défendre !
SupprimerJe vais rajouter deux critiques dont j'ai pu avoir encore récemment et qui pourraient faire réagir.
RépondreSupprimerEn tenant uniquement à les exposer le plus brut dont j'ai pu me souvenir, et les exemples ne sont pas des propos que je cautionne, bien l'inverse.
La première vient d'une personne assez proche de ma famille, avec des enfants en âge de lire des manga de type shônen.
Celle-ci leur refuse la lecture et l'accès par des médiathèques, en expliquant que "l'image de la famille et la relation entre la jeune génération et les adultes sont littéralement brisées."
Des arguments sont même avancés, en expliquant que "dans la plupart des shônen manga, le personnage principal est un jeune homme entre 12 et 17 ans, sans parents (vivants) ou dont les parents sont totalement effacés de leurs rôles de guides et de structurateurs de l'individu.
Ce personnage est livré à lui-même et devra choisir sa vie seul, en ne comptant que sur des personnes du même âge et de même catégorie sociale.
De même, dans les thèmes de la puberté/transformation souvent abordés pour représenter le passage de cet état enfantin à celui de jeune adulte. Pour réussir, il doit se "transformer" pour vaincre les obstacles par lui-même, mais ne doit compter que sur ses amis, et non sur d'autres adultes qui pourraient lui venir en aide et le conseiller".
La seconde, dont j'ai eu affaire pendant des années lors de recherches professionnelles (stages, petits emplois, recherche de CDI), et à mon sens la plus avilissante, reste le regard du monde professionnel.
A moins de postuler pour un manga kissa ou une librairie spécialisée, on signe son arrêt de mort dans le monde du travail si l'on mentionne ce genre de passions.
Au point de ne plus citer, dans cette case des "temps libres", ne plus le mentionner sans pseudonymes mon intérêt prononcé pour l'animation japonaise et la manga en général.
Vous êtes catégorisés comme dangereux et asocial, ou vous prenez des remarques désobligeantes!
Ces mêmes employeurs vous répondent comme si vous aviez écrit sur le CV ou cité en entretien le fait que vos passions sont de vider des animaux et l'huile (oui, pour en manger les animaux avec!)...
En attendant, ces passions m'ont permis :
- de connaître des milliers de personnes;
- de rencontrer des auteurs;
- de partager et débattre aussi bien avec des amateurs que des professionnels des métiers du livre;
- de faire partie de cercles d'amitié franco-nippon dans les villes où j'ai passé mes études;
- d'apprendre par défi les bases du japonais en université avec un autre compagnon de fortune (pour sa part, il en est à passer le JLPT niveau 2 cette année)...
Mais cela, les employeurs ne vous le demanderont pas, vous êtes un malade, vous lisez des manga, honte sur votre famille sur 7 générations!